PREMIÈRE PARTIE

Méditations sur la Passion de Jésus
pendant sa vie privée

13
En route vers la Pâque
En route vers Jérusalem

L’Espérance

 

Tous les habitants du village de Nazareth, du moins ceux que l’âge, les infirmités ou quelque obligation impérative ne retiennent pas à la maison, sont en route vers Jérusalem. C’est une longue route, souvent fatigante pour les mamans chargées d’enfants, mais c’est pourtant la joie, ce sont de vraies vacances, et tout le monde est heureux de délaisser momentanément les tâches quotidiennes. Dans quelques jours c’est la Pâque... et cette année, les rabbins ont décidé que c’est tout le village, uni dans une même fête, qui célébrera la délivrance d’Israël.

Les femmes et les jeunes filles marchent avec tous les enfants: c’est une belle cohue, chaleureuse mais bruyante. Pour une fois on peut laisser libre cours à toutes ses envies de chanter, de jouer, de courir, et même de bavarder. Les hommes, de leur côté, ne sont pas plus réservés, et parfois on entend de grandes exclamations ponctuées de cris et de rires... Les jeunes hommes se bousculent amicalement, ce qui ne les empêche pas, lorsque c’est le moment, d’écouter leurs aînés quand ils abordent des sujets plus sérieux.

On devra marcher ainsi pendant plusieurs jours avant d’atteindre la ville sainte, et les rabbins présents en profitent pour donner quelques avis, quelques conseils et même des enseignements à leurs troupes avides de connaître les bienfaits de Dieu pour son Peuple.

Jésus marche avec les hommes, mêlé à eux, mais sa haute taille fait qu’on le voit tout de suite. Comme ses compatriotes, Jésus écoute les rabbins. Il sait aussi se mêler aux jeux des jeunes et aux chants qui expriment la joie et les espoirs d’Israël. Jésus est un homme parmi les hommes. Jésus vit comme tous les hommes ses frères, mais parfois sa charité entraînante se manifeste davantage quand il faut aider quelqu’un. Jésus est toujours présent pour ceux qui ont besoin d’un réconfort, d’une parole apaisante, d’un sourire qui redonne des forces. Il semblerait même que les Nazaréens apprécient la gentillesse de Jésus, car sans cesse on l’appelle: pour tout et pour rien, juste pour sentir sa présence, jouir de son sourire, bénéficier de sa paix, de son amour qui toujours transparaît.

Les Nazaréens montent vers Jérusalem. Malgré la joie et le bonheur qui règnent dans le groupe, les journées sont parfois rudes à cause de la chaleur et des chemins montants et rocailleux. C’est pourquoi le soir, quand les familles sont réunies, que les repas champêtres ont été rapidement pris, et que les plus petits enfants sont couchés, il fait bon se rassembler autour d’un beau feu de branchages, pour évoquer les événements de la journée, ses joies, mais aussi ses fatigues et ses peines. On rend grâce à Dieu et on chante la confiance que l’on a en Lui. Comme l’exprime si bien le psaume, le Dieu Tout-Puissant mais si bon, si on observe les commandements, sera toujours l’abri de son Peuple, car en Lui se trouve l’espérance du peuple Juif. 

Psaume 71 (70)

1-En Toi, Seigneur, j’ai mon abri, ne me laisse pas sur une déception.

4-Ô Dieu, libère-moi de la main du méchant, tire-moi des griffes du pervers et du violent.

9-Ne me rejette pas au temps de ma vieillesse, ne T’éloigne pas quand déclinent mes forces.

– Oui ! L’Éternel nous protégera toujours; toujours Il nous délivrera de la main des méchants, commente le rabbin qui semble être le chef du village. Bien sûr, les Romains sont là, qui occupent le pays et le soumettent à leurs lois impies. Bien sûr il faut leur payer des impôts souvent insupportables, mais bientôt le Messie attendu viendra, -peut-être est-il déjà né...- et Il nous délivrera de la mains des oppresseurs, de ces Romains honnis... Curieusement, à l’évocation des Romains, le  silence cesse, les langues se délient bruyamment, et des cris de haine jaillissent çà et là...

Jésus ne dit rien. Doucement, sans éveiller l’attention, Il se lève et s’éloigne. Joseph Le voit partir mais ne demande rien: il connaît les habitudes de son saint Fils qui a toujours besoin de prier et de se recueillir.

Maintenant Jésus est seul: ses yeux se lèvent vers le Père du Ciel et comme dans un souffle Il reprend le psaume que ses amis viennent de chanter, mais Il poursuit: “Oui, Père, en Toi j’ai mon abri, en Toi je me confie. Oui Père, mais le prophète a dit aussi: libère-Moi de la mains des méchants... Père, mes adversaires ne se montrent pas encore, pourtant je sais, dans mon Cœur,

10-qu’ils parlent à mon sujet. Ceux qui espèrent ma mort font leurs plans.

11-Et l’on dit: même Dieu l’a abandonné, allons-y, empoignez-le, nul ne viendra l’aider.

Ô Père, quand l’Heure sera venue, ne M’abandonne pas:

12-ne sois pas loin de moi, en Toi je me confie, Père, viens toujours à mon aide. Donne-Moi de toujours Te redire:

20-Mes épreuves ont été nombreuses et dures, mais toujours Tu reviens pour me redonner vie.

21-Tu me feras remonter des abîmes de la terre, Tu me remettras sur pied, et de nouveau, j’aurai ton réconfort.

Oui ! Père, Je sais que revenu à Toi Je ressusciterai... Mais ce soir mon Cœur se trouble...

Père Je suis ton Fils, ton Unique, Je suis ton Verbe, Seigneur, ta Parole créatrice, Je suis le Messie que Tu envoies pour délivrer les hommes de l’emprise de Satan. Dieu, mon Père, Je sais de toute éternité que ton Messie, comme le proclame le Psaume 72 (71),

12- délivrera le pauvre qui appelle, et le petit qui est sans aide.

13-Qu’il aura compassion du faible et du pauvre, qu’il sauvera l’âme des pauvres.

Père! que ta Miséricorde est grande.

17-Que ton nom demeure à jamais, qu’il dure sous le soleil! En lui seront bénies toutes les races de la terre, toutes les nations le diront bienheureux.

Oui Père, car telle est ta volonté... Mais avant il faut que le Fils de l’Homme soit rejeté, abandonné, livré aux mains des méchants, et tué. Père, Je sais que c’est ta volonté, que c’est notre Volonté Trinitaire que l’homme qui unit en Lui les deux natures: divine et humaine, c’est notre volonté que l’homme Fils de Dieu et Fils de l’Homme doit être élevé de terre et transpercé pour attirer tout à Lui. Et les pauvres humains qui ne comprendront pas qu’ils viennent d’être sauvés, regarderont Celui qu’ils auront transpercé, Celui dont ils auront ouvert le Cœur d’où couleront de l’eau et du sang.

Père, l’Heure de mon Sacrifice est encore loin. Mon œuvre très humble de prière et d’amour au milieu des pauvres de ton peuple doit se poursuivre encore. Père, ouvre le cœur de tes pauvres qui M’aiment mais qui n’ont pas compris que le Messie n’est pas pour eux seuls. Ouvre le cœur de ton Peuple Choisi qui ne peut pas encore imaginer que ton Messie, ton Envoyé, viendra appeler toutes les nations. Père, éclaire l’intelligence de tes pauvres pour qu’ils comprennent que, Toi Père, et Moi, ton Fils que Tu envoies, nous aimons tous les hommes, sans distinction de race, et même les Romains... Oui, Père, ce sont vraiment toutes les nations que nous appelons à notre Amour Trinitaire. Père, que cela devienne leur espérance.”

La prière de Jésus s’achève. Lentement Il revient vers les siens. Mais voici qu’Il soupire longuement, tristement, car Il sait que beaucoup ne comprendront pas l’Amour qui vient de Dieu. Jésus revient vers les siens; pendant longtemps encore Il délivrera le pauvre qui appelle, et le petit qui est sans aide... sans montrer son angoisse...

Jésus sait qu’Il est l’espérance des hommes, mais les hommes ne le savent pas encore.

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