Léon Dupont
Le “saint homme” de Tours
1797-1876

 « simple laïc », déclaré « vénérable » par l’Église

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Monsieur Dupont et saint Martin
 

Nous avons vu plus haut[1] que M. Dupont avait exprimé le désir de retrouver l'emplacement du tombeau de saint Martin et de reconstuire la basilique qui avait été complètement détruite en 1793. Malgré ses nombreuses occupations il gardait ce souci en tête, prêt à saisir la première occasion. Déjà en 1849, une grande procession avait été organisée par Mgr Morlot, pour implorer la fin d'une grande épidémie de choléra qui s'était abattue sur la ville; l'épidémie cessa immédiatement. Les décès cessèrent aussi. Mieux, des malades qui étaient condamnés revinrent à la vie... La ville de Tours avait été délivrée miraculeusement du fléau qui la ravageait grâce à la protection de  saint Martin.

En 1853, l'évêque de Tours racheta les ruines du monastère de Ligugé, et M. Dupont fut mis en relation avec les moines bénédictins. Une forte relation d'amitié naquit entre lui et Dom Guéranger. M. Dupont eut alors l'idée de fonder une œuvre charitable: Le Vestiaire de saint Martin, association approuvée par l'évêque de Tours, Mgr Morlot. Les personnes qui remettaient les vêtements en état exprimèrent le désir de "relever le culte du grand thaumaturge des Gaules". Le nouvel évêque[2], Mgr Guibert, accepta, mais fut réservé au sujet de la reconstruction de la basilique: il fallait d'abord retrouver l'emplacement du tombeau de saint Martin. Toutefois, en 1856, Mgr Morlot devenu cardinal, obtint du pape Pie IX la bénédiction du projet de rétablissement de la basilique. En août 1859 le premier pèlerinage général de la Touraine à Candes[3] fut organisé.

Le 14 décembre 1860 l'architecte de la ville découvrit dans les archives de la préfecture un vieux document datant de 1686, qui permit, après plusieurs regroupements, de localiser l'emplacement recherché: il suffisait d'acheter trois maisons... On acheta les trois maisons, et, après de nouvelles recherches et des fouilles méthodiques, on retrouva le tombeau. Il faut signaler également la grande valeur archéologique des fouilles entreprises dans la rue Saint Martin à partir de 1861. Leur examen attentif  permit de retrouver les fondations des églises des Vè, XIè, XIIè et XIIIè siècles qui s'étaient succédé sur le tombeau de saint Martin.

Une chapelle provisoire fut construite et les visiteurs affluèrent. Les pèlerinages et les fêtes en l'honneur de saint Martin vont dès lors se multiplier. Le conseil municipal qui voulait embellir la ville donna son accord pour la reconstruction d'une église sur les fondations de l'ancienne basilique. Les travaux de la crypte allaient commencer... mais soudain, en 1862, les Conférences de Saint Vincent de Paul furent supprimées en France. Les passions agitèrent la ville, les vieilles haines resurgirent; et les élections de 1865 amenèrent un conseil municipal hostile. Puis ce fut la guerre de 1870, et tout s'arrêta.

M. Dupont avait retrouvé le tombeau de saint Martin et remis les pèlerinages en honneur. Un oratoire avait été construit et béni par Mgr Guibert à l'emplacement du tombeau de Saint Martin, mais la grande basilique à laquelle il songeait ne fut pas construite.

Sur les lieux, Monsieur Dupont avait eu la joie de voir s’élever une chapelle provisoire et d’y participer. En 1866, ce fut la mise en place d’un magnifique ciborium[4] qu’on peut admirer aujourd’hui au-dessus de l’autel majeur de la basilique actuelle. Il convient d'insister fortement sur un point. L'entreprise de M. Dupont et de ses amis avait un support essentiellement réparateur: pour lui, c'était un acte de réparation. "Un outrage satanique, un crime de destruction impie avait été commis contre Notre-Seigneur: pour réparer ce crime, il fallait réédifier ce qui avait été détruit... La génération présente expierait le crime de ses pères... et vaincrait le perpétuel adversaire de saint Martin sur un terrain où il se croyait maître invincible et tranquille possesseur."


[1] Paragraphe 1-3.
[2] Mgr Morlot venait d'être nommé cardinal.
[3] C'est à Candes, situé à quelques kilomètres de Saumur que mourut saint Martin.
[4] Ciborium: baldaquin surmontant un autel.

   

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