Saint Joseph! Il y a moins d’un an
je ne vous connaissais pas. Pour des raisons que moi j’ignore, vous m’avez
d’abord attirée chez vous, dans votre sanctuaire de Saint Joseph de Mont-Rouge.
Il y a un an, je ne pensais pas souvent à vous. J’entendais par-ci, par-là des
personnes qui vous priaient, qui avaient confiance en vous, et qui vantaient vos
mérites... Mais moi, je ne savais pas vous prier car je ne vous connaissais pas.
Je ne vous connaissais pas, quoique
j’avais souvent dans l’esprit et dans le coeur le souvenir votre regard qui, il
y a quelques années, lorsque je vins la première fois à Puimisson, et seulement
pour deux ou trois heures, semblait me suivre avec insistance... L’étrange
regard de votre statue, celle de la chapelle de Mont-Rouge, votre regard vivant
me regardait avec une telle intensité qu’il semblait m’appeler. J’avais alors
fait une remarque à mes amis pour leur demander s’ils avaient ressenti la même
impression. Mais j’étais la seule à avoir connu cette curieuse sensation que je
n’ai jamais retrouvée lors de mes nombreux séjours ultérieurs à Saint Joseph de
Mont-Rouge. Et pourtant, je garde de cette curieuse expérience un souvenir qui
me poursuit.
Saint Joseph, je ne vous
connaissais pas, et je vous ignorais, ou je faisais un peu semblant de vous
ignorer... car je recherchais souvent votre regard vivant, mais sans succès.
Donc, je ne vous connaissais pas, jusqu’au jour où, pour des raisons que
j’ignore, quelqu’un me demanda d’entreprendre une étude sur vous, sur votre vie
dont on ne connaissait pas grand’chose, et sur votre enseignement... Votre
enseignement! L’enseignement du Grand Silencieux!
Sans grande conviction, car
j’entrais dans un domaine qui m’était totalement inconnu, je me suis mise au
travail. Ce fut une révélation, et maintenant j’ai envie de chanter vos
Béatitudes, car vous fûtes, malgré vos épreuves, Joseph, vous fûtes un homme
heureux... Un homme heureux car vous fûtes un juste, l’homme juste, le saint par
excellence dont la Bible esquissait déjà les contours, les qualités et les
vertus, l’homme que d’avance Dieu façonnait pour le prédestiner à être le
Gardien, le Nourricier et l’Éducateur du Fils de Dieu...
Saint Joseph, devenu mon ami,
aidez-moi à chanter vos béatitudes, non pas celles qui ont déjà été décrites
dans les livres, mais les béatitudes que vous avez vécues dans le secret de
votre coeur, votre coeur d’époux de Marie la toute Sainte, votre coeur de père
du Fils de Dieu.
Les béatitudes qui furent les
vôtres et que vous réservez aux hommes d’aujourd’hui!
Prenant la parole, Jésus, doux et
humble de coeur se mit à instruire ses disciples:
Heureux ceux qui ont un
coeur de pauvre, le Royaume des Cieux est à eux.
Heureux les doux: ils
posséderont la terre.
Heureux ceux qui pleurent:
ils seront consolés.
Heureux ceux qui ont faim
et soif de la justice, ils seront rassasiés.
Heureux les miséricordieux:
ils obtiendront miséricorde.
Heureux les coeurs purs:
ils verront Dieu.
Heureux les artisans de
paix: ils seront appelés fils de Dieu.
Heureux ceux qui souffrent
persécution pour la justice: le Royaume des cieux est à eux. Heureux serez-vous
lorsqu’on vous insultera, qu’on vous persécutera et qu’on dira faussement contre
vous toute sorte de mal, à cause de Moi. Réjouissez-vous alors et tressaillez
d’allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux. C’est ainsi, en
effet, qu’on a persécuté les prophètes qui vous ont précédés.
Saint Joseph, ces béatitudes ont
été les vôtres. Vous les avez vécues chaque jour au contact de Jésus et de
Marie. Vous avez connu toutes les béatitudes enseignées et promises par Jésus.
Mais vous avez connu aussi d’autres
béatitudes: la béatitudes des hommes patients, celle des hommes qui aiment Dieu
sans réserve et qui prient, celle des hommes qui louent Dieu et qui sans cesse
rendent grâce. Et par dessus tout, vous avez expérimenté la béatitude des
humbles de coeur, celle de ceux qui se sont totalement remis à la volonté de
Dieu, dans une obéissance sans faille et pleine de confiance.
Vous avez surtout connu les
béatitudes douloureuses de la Croix, ces béatitudes promises par Jésus mais dont
on ne parle pas. Vous avez connu ces béatitudes que les hommes ne veulent plus
connaître, celles des hommes forts et aimant Dieu, ces béatitudes des martyrs,
ces béatitudes que les hommes n’osent pas nommer car ils ne savent plus, ni les
trouver, ni les aimer. Ils ne savent pas qu’elles aussi, ces béatitudes
douloureuses qui furent les vôtres chaque jour, sont la source du bonheur.
Réjouissez-vous alors, et
tressaillez d’allégresse...
Bienheureux Joseph! Bienheureux
Joseph qui avez connu toutes les béatitudes! Bienheureux Joseph qui avez connu
la plénitude du bonheur! Et souvent la plénitude du bonheur dans la plénitude de
la détresse, de l’inconfort, de l’incertitude.
Heureux Joseph, comblé des
Béatitudes du Seigneur, comblé de la joie de Dieu, cette joie qui emplit le
coeur de l’homme et déborde de lui, malgré lui. Joseph doux et humble, Joseph au
regard si pur que vous pouviez regarder Marie sans la troubler.
Joseph si ouvert à la grâce de Dieu
que la Volonté de Dieu était devenue la vôtre! Joseph alors comblé de joie car,
lorsque la volonté de Dieu est devenue la seule volonté de l’homme, alors
l’homme, comme vous, Joseph, est tellement comblé du bonheur de Dieu, que sa
joie humaine devient béatitude infinie sous le regard de l’Amour.
Ô Bienheureux Joseph, tellement
livré à votre Père du Ciel que vous avez eu le bonheur insensé de tenir dans vos
bras le Fils Unique et Éternel du Père. Et ce Fils vous appelait “papa”! Et
votre bonheur était si grand qu’il en devenait parfois insoutenable, qu’il
rayonnait de vous, à votre insu, qu’il émanait de votre coeur si brûlant, fou
d’amour à en éclater.
Bienheureux Joseph tellement
abandonné entre les mains de Dieu, tellement livré à son Amour, tellement humble
entre les mains de votre Seigneur, que vous aviez reçu, paradoxalement, la grâce
insigne de tenir dans vos bras, de protéger, de nourrir votre Seigneur
lui-même!
Bienheureux Joseph tellement livré
à la Miséricorde, que toutes les épreuves, quoique pleinement réelles et parfois
bien dures, se transformaient, dans votre coeur, en un amour tellement grand,
tellement chaud, tellement tendre, que l’épreuve devenait plénitude de joie,
d’une joie douloureuse peut-être, mais joie profonde et intense car joie de
l’union à Dieu.
Bienheureux Joseph, adorant la
volonté de Dieu et son Amour, bienheureux, même dans votre douleur qui préparait
la Rédemption...
Bienheureux Joseph douloureux à
Bethléem dans la recherche d’un logis introuvable, mais comblé de bonheur dans
l’adoration de l’Enfant!
Bienheureux Joseph douloureux au
Temple quand Siméon annonça le glaive qui devait transpercer le coeur de Marie,
mais comblé de bonheur car le Messie promis était enfin là! et c’est vous qui en
aviez la garde! Tant de douleur et tant de joie! Ô Joseph, comme on a du mal à
imaginer une telle cohabitation!
Bienheureux Joseph douloureux dans
la fuite en Égypte, mais comblé de bonheur dans la contemplation de Jésus et de
sa Mère, votre Épouse bien-aimée!
Bienheureux Joseph douloureux quand
vous avez appris le massacre des Innocents, mais tellement reconnaissant, car
Jésus était sauvé!
Bienheureux Joseph douloureux dans
votre vie d’exilé, affronté aux dures peines quotidiennes, aux incalculables
difficultés propres à toute vie d’exilé pour trouver les quelques biens
indispensables à la vie familiale, mais débordant d’amour devant le sourire
reconnaissant de Marie, les premiers mots et les premiers pas de l’Enfant!
Bienheureux Joseph douloureux et
désarçonné chaque fois que l’Ange vous ordonnait de partir sur le champ, sans
explication... mais tellement heureux dans votre soumission libre aux désirs de
Dieu!
Bienheureux Joseph douloureux et
angoissé quand vous avez dû chercher Jésus, pendant trois jours à Jérusalem,
mais tellement comblé de joie quand vous l’avez retrouvé! Vous ne compreniez pas
bien ce qui vous arrivait, mais comme Marie, vous conserviez toutes ces choses
dans votre coeur... Et Jésus vous était soumis! Lui, le Maître du monde vous
obéissait et apprenait de vous les choses de la vie humaine...
Bienheureux Joseph douloureux quand
vous alliez prier à la synagogue le jour du Shabbat! Douloureux, car vous
commenciez à comprendre les écritures, et ce qui y était caché, parfois se
révélait à vous. Mais heureux Joseph qui saviez que l’Heure de Dieu approchait,
l’Heure du salut de votre peuple et de tous les hommes!
Bienheureux Joseph douloureux à
chaque Pâque, quand votre intuition vous disait qu’un jour, l’agneau pascal que
vous immoliez au cours de la liturgie familiale, serait l’Agneau Pascal de Dieu,
l’Agneau promis à Israël, serait Celui sur lequel vous veilliez avec tant de
sollicitude et d’amour! Celui que votre coeur aimait tant! Mais Heureux Joseph
quand Dieu levait le voile qui Le cachait et se révélait à vous, se révélait à
vous à travers le regard pur et profond du Fils, de l’Amour, et vous faisait
comprendre que, Lui, l’Amour, le Sauveur du monde, et votre Sauveur, votre
Rédempteur à vous aussi, Lui, vous aimait et vous était reconnaissant! Dieu
reconnaissant envers un homme! Quel bonheur incompréhensible!
Bienheureux Joseph douloureux
parfois dans votre travail quotidien, mais si heureux de participer à la
Création, à l’Oeuvre de Dieu!
Bienheureux Joseph douloureux dans
vos relations avec les membres de votre famille terrestre, mais comblé de
bonheur dans votre Sainte Famille!
Bienheureux Joseph douloureux dans
votre offrande à Dieu, l’offrande de votre moi, offrande tellement prise au
sérieux par le Père du Ciel, mais si heureux quand vous vous souveniez que ce
même Père vous confiait son Fils! Et que vous contempliez ce mystère incroyable!
Bienheureux Joseph douloureux quand
vous ne compreniez pas les voies du Seigneur, les voies de Dieu que l’homme ne
peut pas comprendre, mais si heureux quand Jésus vous enseignait ce qui était
caché dans les Écritures et dans les psaumes!
Bienheureux Joseph douloureux quand
vous pensiez dans votre coeur, à la future passion de votre Épouse bien-aimée,
douleur d’autant plus aiguë que vous ne pouviez imaginer ce qu’elle serait
vraiment, mais si heureux quand vous la regardiez attentive à vous servir et à
se confier totalement en vous!
Bienheureux Joseph douloureux quand
vous avez compris qu’il était temps pour vous de quitter cette terre pour
rejoindre vos pères, mais si heureux d’être assisté par Jésus, de mourir dans
les bras de Jésus et caressé par Marie!
Bienheureux Joseph douloureux dans
la mort, mais si heureux de partir annoncer aux élus, qui attendaient dans les
Limbes, que leur délivrance était proche!
Bienheureux Joseph au sourire si
doux, bienheureux Joseph, doux et humble de coeur, bienheureux Joseph qui avez
connu le Coeur du sauveur...
Bienheureux Joseph qui, tant de
fois avez laissé reposer le Coeur de Jésus, le Coeur de Dieu sur votre propre
coeur... qui avez aussi, comme Jean, mais bien plus souvent... reposé votre tête
sur le Coeur de Jésus...
Bienheureux Joseph qui avez connu,
vu et contemplé le visage de Dieu, qui avez entendu les Paroles de Dieu, qui
avez senti palpiter dans vos bras le Coeur de Dieu!
Ô Bienheureux Joseph! Votre bonheur
était tout simple car c’était le bonheur de Dieu, le bonheur du Père! Votre
bonheur était tout simple, mais il était plénitude, car c’était le bonheur de
Dieu, ce bonheur infini de Dieu qu’Il vous partageait...
Saint Joseph! Je me plais à Vous
regarder contemplant Jésus, Jésus votre fils adoptif, Jésus doux et humble de
coeur. Je me plais à vous regarder contemplant Marie, lui souriant, la
servant... et l’aimant. Je me plais à vous regarder, pur et humble de coeur,
enseignant Jésus, et lui apprenant, ô merveille! comment aimer et servir Dieu.
Saint Joseph, apprenez-nous à vous
aimer, à vous imiter, à purifier nos coeurs en vivant auprès du vôtre chaque
jour de notre vie.
Alors, Saint Joseph, vivant en
silence, en votre présence, côtoyant votre bonheur, nous apprendrons les vertus
qui furent les vôtres, nous apprendrons à aimer... à aimer Dieu et notre
prochain, et nous connaîtrons le bonheur.
Et nous apprendrons aussi à vous
connaître, Saint Joseph. Nous apprendrons à vous apprécier, vous, Joseph, le
grand silencieux qui parlez à nos coeurs et nous révélez les secrets de Dieu.
|