Chapitre V
Il offre le sacrifice de la messe pour sa sœur défunte

11. Pendant que tout cela se passait, il perdit cette sueur dont nous avons parlé plus haut. Nous ne saurions passer sous silence les visions qu'il eut à son sujet. Il avait conçu une telle aversion pour son genre de vie toute charnelle, qu'il avait fait le vœu de ne plus la revoir jamais en ce monde. Mais quand elle fut morte, délié de son veau, il revit en esprit celle qu'il n'avait plus voulu voir dans sa chair. Une nuit il entendit en songe une voix qui lui disait que sa sueur était là, dans le vestibule, et n'avait rien pris depuis déjà trente jours entiers; il s'éveille à ces mots, et, comprenant de quel genre de nourriture elle était privée, il supputa le nombre de jours qu'il venait d'entendre nommer et il trouva qu'ils répondaient exactement au temps qui s'était écoulé depuis qu'il n'avait point offert pour elle le pain de vie descendu du ciel. Alors, comme il ne détestait que le péché, non point lame de sa sueur, il reprend sa bonne œuvre, qu'il avait interrompue. Ce ne fut pas en vain; car peu de jours après, il lui sembla la voir arrivée à la porte de l'église, mais elle n'y pouvait point encore entrer, et la robe qu'elle portait était de couleur sombre. Il persévéra de son côté et ne passa point un jour sans lui faire l'aumône accoutumée ; il la revit encore, sa robe était presque blanche, elle était entrée dans l'église, mais il ne lui était pas encore permis de toucher à l'autel. Enfin, il la revit une troisième fois; mais alors elle était mêlée à la troupe de ceux qui portaient des robes blanches et elle en avait une elle-même de la même couleur. Vous voyez cher lecteur ce que peut la prière assidue du juste. On peut donc bien dire en vérité que le royaume du ciel souffre violence et qu'il n'y a que les violents qui l'emportent. Ne vous semble-t-il pas, en effet, que la prière de Malachie brisa en quelque sorte, les portes du ciel, quand vous voyez une femme pécheresse obtenir, par la force des armes de son frère, ce qu'elle ne pouvait espérer de ses propres mérites? Mais c'est vous, ô bon Jésus, qui, par les souffrances de votre passion, faites violence an ciel; vous ôtes bon et puissant pour nous sauver, vous faites miséricorde, vous montrez la puissance de votre bras et en conservez la vertu dans votre sacrement pour les saints qui sont sur la terre jusqu'a la consommation des siècles. Car c'est bien ce sacrement qui a la force de consumer le péché, de terrasser les puissances ennemies et de porter aux cieux les âmes qui quittent la terre.

   

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