COMPENDIUM
DU
CATÉCHISME DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE

Quatrième Partie — La Prière Chrétienne - La prière du Seigneur

 

DEUXIÈME SECTION

LA PRIÈRE DU SEIGNEUR :

LE NOTRE PÈRE

 

Notre Père, qui es aux cieux,
que ton Nom soit sanctifié,
que ton Règne vienne,
que ta volonté soit faite,
sur la terre comme au ciel.

Donne-nous aujourd'hui
notre pain de ce jour,
pardonne-nous nos offenses,
comme nous pardonnons
aussi à ceux qui nous ont offensés,
et ne nous soumets pas à la tentation,
mais délivre-nous du mal.

 

(en latin)

Pater noster qui es in cælis :
sanctifícetur Nomen Tuum ;
advéniat Regnum Tuum ;
fiat volúntas Tua,
sicut in cælo, et in terra.

Panem nostrum
cotidiánum da nobis hodie ;
et dimítte nobis débita nostra,
sicut et nos dimíttimus debitóribus nostris ;
et ne nos indúcas in tentatiónem ;
sed líbera nos a Malo.

 

« Un jour, quelque part, Jésus était en prière. Quand il eut terminé, un de ses disciples lui demanda: “Seigneur, apprends-nous à prier” » (Lc 11,1). Jésus répondit en leur apprenant le Notre Père.

Les disciples, qui pourtant étaient des experts dans la prière hébraïque de l'époque, furent fortement frappés par la singularité de la prière de leur maître. En effet, Jésus était continuellement en prière (cf. Lc 5, 16). Les moments les plus importants de sa vie sont accompagnés de la prière : Jésus prie lors de son Baptême dans le Jourdain (Lc 3, 21) ; avant d'appeler les Apôtres (Lc 6, 12) ; avant la Transfiguration (Lc 9, 28). Il prie pour la foi de Pierre (Lc 22, ) et pour l'envoi de l'Esprit Saint. Il prie avant la résurrection de Lazare (Jn 11, 41) et au moment de son entrée triomphale dans Jérusalem (Jn 12, 27). Il prie son Père pour sa glorification lors de la dernière Cène (Jn 17, 15); pour les disciples (Jn 17, 6-19) et pour tous les croyants. Il prie avant sa passion (Lc 22, ) et, au moment de la mort, il prie pour ses ennemis (Lc 23, 34).

La prière de Jésus s'adresse au Père dans un dialogue d'obéissance, qui vivifie sa mission : « Ma nourriture, c'est de faire la volonté de celui qui m'a envoyé et d'accomplir son œuvre » (Jn 4, 34). Cette communion intime avec le Père est source de joie et de louange : « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange […]. Tout m'a été confié par mon Père ; personne ne connaît le Fils, sinon le Père, et personne ne connaît le Père sinon le Fils, et celui à qui le Fils veut bien le révéler » (Mt 11, 25.27).

La prière au Père était la respiration de son existence terrestre. Tout en venant habiter au milieu de nous, Jésus ne s'est jamais éloigné de la maison du Père, c'est-à-dire  de la communion avec lui dans la prière. Par ailleurs, cependant, cette intimité filiale devient proximité salvifique et miséricordieuse auprès de ses frères, jusqu'au sacrifice suprême de la croix.

La prière de Jésus continue encore aujourd'hui (cf. Hb 7, 25). Dans la liturgie eucharistique, le Christ, grand prêtre, offre au Père son sacrifice rédempteur. Il l'offre en communion avec son corps qui est l'Église. Chacune de nos prières s'élève vers le Père « par le Christ Notre Seigneur ». C'est cette prière du Christ qui soutient toutes nos prières,celles du cœur comme celles de la bouche. Quand l'Église prie, c'est le Fils qui embrasse les genoux du Père. La prière des fils monte vers le Père à travers la voix du Premier-Né. Ils sont nombreux, les bras levés pour invoquer, louer et supplier ; mais la voix est unique, c'est celle du Fils.

Le cadre représente Jésus en prière au Gethsémani. Il accueille le calice amer de la passion en obéissance suprême au Père pour le salut de l'humanité.

578. Quelle est l'origine du Notre Père ?

Jésus nous a enseigné cette prière chrétienne irremplaçable, le Notre Père, un jour où un disciple, le voyant prier, lui demanda : « Apprends-nous à prier » (Lc 11, 1). La tradition liturgique a toujours utilisé le texte de Matthieu (6, 9-13).

«LA SYNTHÈSE DE TOUT L'ÉVANGILE »

579. Quelle est la place du Notre Père dans les Écritures ?

Le Notre Père est le « résumé de tout l'Évangile » (Tertullien), « la plus parfaite des prières » (saint Thomas d'Aquin).  Placé au centre du Sermon sur la Montagne (Mt 57), il reprend sous forme de prière le contenu essentiel de l'Évangile.

580. Pourquoi est-il appelé « la prière du Seigneur » ?

Le Notre Père est appelé « Oraison dominicale », c'est-à-dire « la prière du Seigneur », parce qu'il a été enseigné par le Seigneur lui-même.

581. Quelle place tient le Notre Père dans la prière de l'Église ?

Prière par excellence de l'Église, le Notre Père est « remis » au Baptême et à la Confirmation pour manifester la nouvelle naissance à la vie divine des fils de Dieu. L'Eucharistie en révèle le sens plénier, puisque ses demandes, s'appuyant sur le mystère du salut déjà réalisé, seront pleinement exaucées lors de la venue du Seigneur. Le Notre Père fait partie intégrante de la liturgie des Heures.

«NOTRE PÈRE QUI ES AUX CIEUX »

582. Pourquoi pouvons-nous « oser nous approcher en toute confiance » de notre Père ?

Parce que Jésus, notre Rédempteur, nous introduit devant la Face du Père, et que son Esprit fait de nous des fils. Ainsi, nous pouvons prier le Notre Père avec une confiance simple et filiale, avec une joyeuse assurance et une humble audace, dans la certitude d'être aimés et exaucés.

583. Comment est-il possible d'invoquer Dieu comme «Père»?

Nous pouvons invoquer le « Père » parce que le Fils de Dieu  fait homme nous l'a révélé et que son Esprit nous le fait connaître. L'invocation du Père nous fait entrer dans son mystère, avec un émerveillement toujours nouveau, et elle suscite en nous le désir de nous conduire de manière filiale. Avec la prière du Seigneur, nous prenons donc conscience d'être nous-mêmes des fils du Père, dans le Fils.

584. Pourquoi disons-nous « Notre » Père ?

« Notre » exprime une relation complètement nouvelle avec  Dieu. Quand nous prions le Père, nous l'adorons et nous le glorifions avec le Fils et l'Esprit. Dans le Christ, nous sommes « son » peuple, et lui, il est « notre » Dieu, dès maintenant et pour l'éternité. En effet, nous disons « notre » Père parce que l'Église du Christ est la communion d'une multitude de frères, qui ne font qu'« un seul cœur et une seule âme » (Ac 4, 32).

585. Avec quel esprit de communion et de mission prions-nous « notre » Père ?

Étant donné que prier « notre » Père est le bien commun des  baptisés, ces derniers ressentent l'urgent appel à prendre part à la prière de Jésus pour l'unité de ses disciples. Prier le « Notre Père », c'est prier avec et pour tous les hommes, afin qu'ils connaissent le seul et vrai Dieu, et qu'ils soient rassemblés dans l'unité.

 

586. Que signifie l'expression « qui es aux cieux » ?

Cette expression biblique ne désigne pas un lieu, mais une  manière d'être : Dieu est au-delà et au-dessus de tout. Elle désigne la majesté, la sainteté de Dieu, et aussi sa présence dans le cœur des justes. Le Ciel, ou la Maison du Père, constitue la vraie patrie vers laquelle nous tendons dans l'espérance, alors que nous sommes encore sur la terre. Nous vivons déjà en elle, « cachés en Dieu avec le Christ » (Col 3, 3).

LES SEPT DEMANDES

587. Comment se compose la prière du Seigneur ?

Elle contient sept demandes à Dieu le Père. Les trois pre mières, plus théologales, nous tournent vers lui, pour sa gloire : c'est le propre de l'amour de penser avant tout à celui qui nous aime. Elles indiquent ce que nous avons tout particulièrement à demander : la sanctification du Saint Nom, la venue du Royaume, l'accomplissement de Sa volonté. Les quatre dernières demandes présentent au Père de miséricorde nos misères et nos attentes. Elles lui demandent notre nourriture, le pardon, le secours dans les tentations et la délivrance du Malin.

588. Que signifie : « Que ton Nom soit sanctifié » ?

Sanctifier le Nom de Dieu, c'est avant tout une louange qui  reconnaît Dieu comme Saint. Dieu a en effet révélé son Nom à Moïse et il a voulu que son peuple lui soit consacré comme une nation sainte chez qui il habite.

589. Comment le Nom de Dieu est-il sanctifié en nous et dans le monde ?

Sanctifier le Nom de Dieu qui nous appelle « à la sanctification » (1 Th 4, 7), c'est désirer que la consécration baptismale vivifie toute notre vie. C'est aussi demander que, par notre vie et notre prière, le Nom de Dieu soit connu et béni par tout homme.

590. Que demande l'Église lorsqu'elle prie en disant : « Que ton Règne vienne » ?

L'Église implore la venue finale du Royaume de Dieu par le  retour du Christ dans sa gloire. Mais l'Église prie aussi pour  que le Règne de Dieu grandisse dès aujourd'hui par la sanctification des hommes dans l'Esprit et grâce à leurs efforts au service de la justice et de la paix, selon les Béatitudes. Cette demande est le cri de l'Esprit et de l'Épouse : « Viens Seigneur Jésus » (Ap 22, 20).

591. Pourquoi demander : « Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel » ?

La volonté de notre Père est que « tous les hommes soient  sauvés » (1Tm 2, 3). C'est pourquoi Jésus est venu pour  accomplir parfaitement la volonté salvifique du Père. Nous prions Dieu le Père d'unir notre volonté à celle de son Fils, à l'exemple de la Vierge Très Sainte et des Saints. Nous demandons que son dessein d'amour bienveillant se réalise pleinement sur la terre comme c'est déjà le cas au ciel. C'est par la prière que nous pouvons « discerner la volonté de Dieu » (Rm 12, 2) et obtenir la « constance pour l'accomplir » (He 10, 36).

592. Quel est le sens de la demande : « Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour » ?

En demandant à Dieu, avec l'abandon confiant des fils, la  nourriture de tous les jours nécessaires à tous pour leur subsistance, nous reconnaissons combien Dieu notre Père est bon au-delà de toute bonté. Nous demandons aussi la grâce de savoir agir pour que la justice et le partage permettent à ceux qui possèdent en abondance de venir en aide aux besoins des autres.

593. Quel est le sens spécifique de cette demande pour le chrétien ?

Puisque « l'homme ne vit pas seulement de pain, mais de  toute Parole qui sort de la bouche de Dieu » (Mt 4, 4), cette demande concerne également la faim de la Parole de Dieu et du Corps du Christ reçu dans l'Eucharistie, ainsi que la faim de l'Esprit Saint. Nous demandons cela avec une confiance absolue, pour aujourd'hui, l'aujourd'hui de Dieu, et cela nous est donné surtout dans l'Eucharistie, avant-goût du banquet du Royaume qui vient.

594. Pourquoi disons-nous : « Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés » ?

En demandant à Dieu notre Père de nous pardonner, nous  nous reconnaissons pécheurs devant lui. Mais nous confessons en même temps sa miséricorde parce que, en son Fils et par les sacrements, « nous recevons la rédemption et la rémission de nos péchés » (Col 1, 14). Notre demande ne sera cependant exaucée qu'à condition que, de notre côté, nous ayons d'abord pardonné.

595. Comment le pardon est-il possible ?

La miséricorde ne pénètre notre cœur que si nous savons,  nous aussi, pardonner, même à nos ennemis. Désormais, même si, pour l'homme, il semble impossible de satisfaire à cette exigence, le cœur qui s'offre à l'Esprit Saint peut, comme le Christ, aimer jusqu'à l'extrême de l'amour, transformer la blessure en compassion, et l'offense en intercession. Le pardon participe de la miséricorde de Dieu et est un des sommets de la prière chrétienne.

596. Que veut dire : « Ne nous soumets pas à la tentation » ?

Nous demandons à Dieu notre Père de ne pas nous laisser seuls au pouvoir de la tentation. Nous demandons à l'Esprit de savoir discerner d'une part entre l'épreuve qui nous fait grandir dans le bien et la tentation qui mène au péché et à la mort, et, d'autre part, entre être tenté et consentir à la tentation. Cette demande nous unit à Jésus qui a vaincu la tentation par sa prière. Elle sollicite la grâce de la vigilance et de la persévérance finale.

597. Pourquoi finissons-nous en demandant : « Délivre-nous du Mal » ?

Le Mal désigne la personne de Satan, qui s'oppose à Dieu  et qui est « le séducteur de toute la terre » (Ap 12, 9). La victoire sur le diable a déjà été acquise par le Christ. Mais nous prions afin que la famille humaine soit libérée de Satan et de ses œuvres. Nous demandons aussi le don précieux de la paix et la grâce d'attendre avec persévérance la venue du Christ, qui nous libérera définitivement du Malin.

598. Que signifie l'Amen de la fin ?

« Puis, la prière achevée, tu dis Amen, contresignant par  cet Amen, qui signifie “Que cela se fasse”, ce que contient  la prière que Dieu nous a enseignée » (saint Cyrille de Jérusalem).

Les anges sont des créatures de Dieu.

Un certain nombre d'entre eux est resté et reste toujours fidèle à Dieu, en sa présence, à son service, au service de l'Église et uni à tous ceux qui sont sauvés et qui sont dans la gloire du ciel.

Comme dans la vision de l'échelle de Jacob - « les anges de Dieu y montaient et descendaient » (Gn 28, 12) - les anges sont des messagers dynamiques et infatigables, qui lient le ciel à la terre. Entre Dieu et l'humanité, ne règne pas le silence et l'incommunicabilité, mais le dialogue continuel, la communication incessante. Et les hommes, destinataires de cette communication, doivent affiner leur oreille spirituelle, pour écouter et comprendre cette langue angélique, qui suggère de bonnes paroles, de saints sentiments, des actions miséricordieuses, des comportements charitables et des relations édifiantes.

C'est ce que nous demandons à l'ange gardien dans la fameuse prière de la piété populaire catholique :

 

« Ange de Dieu,
qui es mon gardien,
et à qui j'ai été confié par la Bonté divine,
éclaire-moi, défends-moi,
Conduis-moi et dirige-moi. Amen ».

 

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