Paulette Leblanc



DES CRIS VERS DIEU
UN CRI DU CŒUR

Réflexions d'un chrétien de la base

20
Jusqu'à la mort

Un autre point semble devoir être traité, c'est celui de la mort. Tous les hommes sont mortels: c'est une vérité que jusqu'à présent personne n'a pu nier. Par ailleurs, nous savons qu'il y aura une résurrection finale, mais aujourd'hui, personne ne sait ni quand, ni comment cela se fera. Et personne, de tous les hommes de tous les temps, personne n'est revenu nous dire ce qui se passait après la mort. Seuls Jésus et Marie le savent. En ce qui concerne Jésus-Christ, Dieu et Homme et réelle incarnation du Verbe de Dieu, c'est normal: son humanité devait mourir puisqu'elle était vraiment humaine, mais sa divinité devait la ressusciter afin que le Christ soit "toujours avec nous jusqu'à la fin des temps".

Pour la Vierge Marie le sujet est peut-être plus difficile à aborder, au moins dans un premier temps, mais on comprend vite que celle qui fut la Mère du Christ, vrai Dieu et vrai Homme, donc Mère de Dieu comme l'Église l'appelle, devait, immédiatement après sa dormition, retourner nécessairement auprès du Fils, retrouver le Saint-Esprit dont elle fut l'épouse et "plonger" dans le Père dont elle sera éternellement la Fille bénie et chérie.

Jésus et Marie sont ainsi les signes de notre future résurrection. Ils sont notre espérance et le gage de notre propre résurrection. Mais notre résurrection, ce n'est pas pour demain, et, de toutes façons, quel qu'en soit le jour, il nous faudra toujours, comme d'ailleurs Jésus et Marie l'ont fait, il nous faudra toujours traverser l'épreuve redoutée de notre mort. Redouter la mort, c'est normal, et même les plus grands saints ont connu des traversées de désert terribles, des crises de la foi redoutables avant de vivre une mort étonnamment paisible, vraie rencontre avec Dieu qu'ils avaient tant aimé et servi durant leur vie[1].

On ne peut pas raconter une mort, car ce que l'homme qui s'en va vers Dieu vit pendant son passage, ou mieux, sa naissance au monde de Dieu, personne n'a pu venir nous le raconter, même si certaines EMI (Expérience de mort imminente) ont pu nous en donner une petite idée. Alors, pourquoi parler de la mort dans un document consacré à la notion de "sentir Dieu"? Peut-être parce que la mort est à la fois la dernière expérience de la rencontre avec Dieu sur la terre, et la première expérience de cette rencontre, mais dans le monde de Dieu. Une expérience, deux "sensations"...

D'après les médecins et des prêtres[2], la mort comprendrait au moins deux étapes: l'une pendant laquelle le mourant, inconscient dans son corps mais conscient dans son âme, revoit sa vie et peut, s'il le veut, regretter ses péchés et revenir à l'amour de Dieu. Certes, il pourra faire un long purgatoire, mais il est sauvé, pour l'éternité. Vient ensuite la deuxième étape de la mort dont on ne connaît encore rien. La mort est là, l'homme a fait son choix définitif acceptant ou refusant Dieu pour l'éternité. Le corps va commencer à se décomposer; quant à l'âme qui vient de revivre toute sa vie, c'est elle-même qui, devant Dieu qu'elle a "vu" et dont elle a découvert l'amour l'espace d'un instant, se juge elle-même et choisit son "avenir". Est-elle très pure et pleine d'amour: elle rejoint le Père qui l'accueille en son sein: c'est le ciel.

Il se peut aussi que l'âme aime beaucoup Dieu et ait longtemps travaillé pour Lui; mais voici que soudain elle découvre en elle de trop nombreuses taches ou imperfections qu'elle doit nettoyer avant de rejoindre Dieu: elle doit aller se purifier; mais ayant "vu" Dieu l'espace d'un instant, son cœur plein d'amour souffre beaucoup de la séparation: c'est le Purgatoire.

Enfin, il y a ceux qui ne veulent pas de Dieu et qui, délibérément, comme Lucifer, choisissent l'enfer. Sont-ils nombreux ces gens qui font ce choix redoutable? Nous ne savons pas. De nos jours, certains, y compris des prêtres!... mettent en doute l'existence de l'enfer; c'est tellement stupéfiant qu'on pourrait être en droit de se demander si ces gens ont lu l'Évangile, car les enseignements de Jésus sont très clairs à ce sujet et ne peuvent faire l'objet d'aucun doute.

Nous venons de parler du jugement particulier. Plus tard viendront la fin des temps[3], le jugement dernier et la résurrection des corps; mais ce n'est pas notre sujet.

Alors, faut-il avoir peur de la mort? Pourquoi tant de gens ont-ils peur de la mort? Et pourquoi beaucoup d'honnêtes gens, des gens qui n'ont pensé qu'à faire du bien à leur prochain, pourquoi ces gens-là ont-ils aussi peur de la mort? La mort est le châtiment du péché d'Adam. Nous ne pouvons pas accuser Dieu d'injustice car, malheureusement, nous sommes tous pécheurs. Et le péché, même véniel, est toujours comme un refus de l'amour de Dieu, donc une tache sur notre âme, tache que nous devons effacer avant de nous présenter devant Dieu. Le purgatoire est donc facile à comprendre: il n'est qu'une séparation, très douloureuse, certes, d'avec Dieu, mais momentanée. Alors pourquoi cette peur de la mort ?

Nous avons longuement expliqué que Dieu était notre milieu vital. Mais nous sommes tellement accoutumés à ce milieu vital que nous n'y pensons plus, que nous ne le sentons plus, sauf à des occasions particulières et généralement rares. Et puis, n'est-ce pas, nous n'avons pas besoin de "sentir" Dieu. Alors nous vivons notre moment présent tel qu'il se présente, donc terrestre, c'est-à-dire matériel, sans penser à autre chose; et Dieu est vite oublié. Mais la mort va nous remettre brutalement en présence de Dieu que nous avions oublié, négligé et comme nous ne souvenons plus de ce qu'est "sentir" Dieu, de ce qu'est l'amour de Dieu pour nous, soudain nous avons peur.

Je voudrais faire ici une petite remarque pour que l'on me comprenne bien: "sentir" Dieu n'est ni de l'exaltation, ni une joie ou un bonheur anormaux mais passagers. Même pendant les grandes épreuves de purification que tous les saints ont connues, même pendant les périodes de ténèbres spirituelles où l'on peut même aller jusqu'à se demander si Dieu existe vraiment, on peut connaître des instants de rémission qui redonnent des forces pour continuer le sacrifice qui, en lien avec le sacrifice du Christ, sauvera des âmes. Instants de rémission où l'on retrouve Dieu, donc, où on le "sent".

En conséquence, n'ayons pas peur de "sentir" Dieu. Nous devrions avoir moins peur de la mort.


[1] Le cas de sainte Thérèse de Lisieux est particulièrement significatif.
[2] En particulier le saint curé d'Ars qui sut dire à une femme affligée que son mari, qui s'était suicidé en se jetant du haut d'un pont, avait eu le temps de regretter son péché avant de mourir.
[3] Voir l'Apocalypse.

   

 

pour toute suggestion ou demande d'informations