

FLEURS DE LA PASSION
PENSEES DE SAINT PAUL DE LA CROIX
LA PASSION
ET LA SAINTE VOLONTÉ DE DIEU.
Résignation à la volonté de Dieu en
toutes choses ; en faire fréquemment des actes ; voir avec l’œil de la foi
toutes les peines intérieures et extérieures, parce Dieu les veut ; ne point
penser à l’avenir, c’est-à-dire aux malheurs, aux peines et autres événements
que l’imagination se forge, mais les faire mourir dans la volonté de Dieu ; je
poursuis ma recette et je la termine : broyer toutes les peines et les
souffrances avec patience et en silence, puis en faire une pilule qu’on pétrit
avec le baume de la Passion de Jésus-Christ, qu’on avale avec la foi et l’amour,
et que la chaleur de la charité fait digérer.
Seigneur, disposez de moi selon
votre volonté ; que je sois tourmenté autant qu’il vous plaira ; tout m’est
égal ; car je ne me séparerai jamais de vous. Exécutez sur moi votre bon
plaisir ; je veux de plus en plus m’approcher de vous…
Vous me fuyez, Seigneur ; mais quoi
que vous fassiez, je serai toujours à vous et toujours j’irai à votre recherche.
Je vois bien que vous me fuyez, parce que je vous suis ; Seigneur, faites de moi
tout ce que vous voudrez ; que je souffre autant qu’il vous plaira ; je serai
toujours à vous ; vous avez beau me fuir, je ne cesserai malgré cela de vous
chercher.
O bonté infinie de mon Jésus ! vous
me fuyez pourtant, Seigneur ; mais fuyez aussi loin que vous voudrez, je serai
toujours à vous ; je vous suivrai toujours, et toujours je serai entièrement à
vous.
Dans toutes vos peines ou
désolations intérieures, pratiquez souvent l’exercice de l’abandon total à la
sainte volonté de Dieu. Récitez le chapelet que sainte Gertrude a composé
uniquement de ces paroles : Fiat voluntas tua : Que votre volonté soit faite.
D’autres fois, dites avec les
sentiments d’une parfaite conformité à cette volonté divine : « Vos
jugements, Seigneur, sont justes et équitables. Toute votre conduite est basée
sur la justice, parce que nous avons péché et que nous n’avons pas obéi à vos
commandements » (Tob. III. 2. etc.)
Un jour, le Seigneur fit paraître à
ma vue un gros faisceau de croix ; en même temps il m’inspira intérieurement de
plonger ma volonté propre, comme une goutte d’eau, dans l’océan immense de la
volonté tout aimable de Dieu. Je le fis, et en un clin d’œil toutes les croix
s’évanouirent.
Une des preuves les plus claires de
l’amour qu’on a pour Dieu, c’est de chercher uniquement son bon plaisir, de ne
désirer que Dieu : Dilectus meus mihi et ego illi ; mon Bien-Aimé est à moi
et je suis à Lui (Cant. Cant. II. 16.) ; et d’exécuter promptement sa
volonté, dès qu’on la connaît. De même que la cire qu’on approche du feu prend
toutes les formes qu’on veut ; de même l’âme aimante doit se liquéfier dès que
le Bien-Aimé a parlé.
Que la volonté de Dieu soit notre
élément, notre centre, notre repos ; nous y goûterons un sommeil tranquille,
doux et paisible ; aucun événement ne pourra nous causer du trouble. Laissons
faire le bon Dieu ; que la volonté de Dieu soit faite ; que le Seigneur soit
béni à jamais ; je ne veux ni plus ni moins que la volonté et le bon plaisir de
Dieu, soit dans le temps, soit dans l’éternité : je ne puis vouloir que ce que
veut mon Dieu.
Dans tous les accidents fâcheux,
dites en inclinant la tête : Que la très sainte et aimable volonté de Dieu
soit faite... – Ou bien ces paroles de l’Évangile : Je suis venu non pour
faire ma volonté, mais la volonté de mon Père qui m’a envoyé (Joan. VI.
38.). Ma nourriture est de faire la volonté de mon Père (Joan. IV. 34.).
Il n’y a ni repos ni paix possible
pour celui qui résiste à la volonté de Dieu : Quis restitit ei, et pacem
habuit ? [qui lui a résisté, et est demeuré en paix ?] (Job. IX. 4.)
Dans les maux et les traverses que
Dieu nous envoie, il faut nous humilier et incliner la tête, parce que s’il veut
nous donner un soufflet et que nous levions la tête, il nous en donnera dix ; au
contraire, si nous baissons la tête et qu’il ait dessein de nous donner dix
soufflets, à peine s’il nous en donnera un seul.
Ne regardez jamais l’instrument de
vos épreuves ; mais figurez-vous que Jésus-Christ vous les présente de sa propre
main.
Si, allant au jardin pour cueillir
des fruits, vous étiez surpris par une forte pluie, que feriez-vous ? Vous iriez
vous abriter dans la chaumière, n’est-il pas vrai ? De même, quand les
angoisses, les tribulations, les amertumes pleuvent sur vous, il faut vous
cacher dans l’asile assuré de la volonté de Dieu, et de la sorte vous n’en serez
pas mouillé.
Quand est-ce que nous serons morts
à tout, afin de vivre pour Dieu ? Ah ! oui, quand viendra ce moment ? O mort
précieuse, plus désirable que la vie, mort qui nous divinise parce qu’elle nous
transforme en Dieu par amour ! – Saint Jean Chrysostome a dit : Silentium,
quod lutum praebet figulo, idem ipse praebe conditori tuo. O quelle
sentence ! Il veut dire : ce silence que l’argile et la boue gardent dans les
mains du potier, gardez-le vous-même dans les mains de votre Créateur. L’argile
se tait toujours ; que le potier en fasse un vase d’honneur ou un vase
d’ignominie ; il se tait, soit qu’il le rompe, soit qu’il en jette les débris
dans un cloaque ; il se tait, et il est aussi content que si on le plaçait dans
la galerie du roi ; gravez dans votre mémoire cette grave leçon.
Les désirs même les plus saints,
soit à l’égard des âmes, soit au sujet des besoins de l’Église, qui sont fort
grands, il faut les laisser mourir dans le feu de l’amour de Dieu, d’où ils
procèdent, et attendre le temps où Dieu en voudra l’accomplissement. Dans
l’intervalle, cultivez un seul désir, le plus parfait de tous, qui est de plaire
de plus en plus à Dieu et de vous nourrir de sa sainte volonté.
Nourrissez-vous de la sainte
volonté de Dieu ; buvez au calice de Jésus, les yeux fermés, sans vouloir
connaître ce qu’il y a dedans ; il suffit de savoir que ce calice nous est
offert par le doux Jésus.
Surtout, faites-vous une grande
habitude de la résignation à la volonté divine, faites-en souvent des actes : O
chère volonté ! O sainte volonté de Dieu, je vous aime ! O douce volonté de mon
Père et de mon Dieu, soyez toujours bénie ! O sainte, ô douce volonté, vous êtes
mes délices ! La nourriture de mon Jésus était de faire la volonté du Père
éternel, ma nourriture sera aussi de faire toujours sa sainte volonté.
Abandonnez-vous à la sainte volonté
de Dieu ; elle doit être votre nourriture continuelle ; le doux Jésus fit
toujours sa nourriture de la volonté de son Père, qui voulait le voir dans une
mer de souffrances. Soyez magnanime, gardez-vous de vous laisser épouvanter par
le démon, tenez-vous caché en Dieu, rien ne pourra vous nuire. N’abandonnez pas
l’oraison ; soyez fort et constant. Courage donc ! Dieu veut faire de vous un
saint : que Jésus vous bénisse !
Humiliez-vous, résignez-vous,
abandonnez-vous à Dieu avec une grande confiance, en vous tenant toujours dans
votre néant.
La divine volonté est un baume qui
guérit toutes les peines ; il faut la caresser et l’aimer dans l’adversité comme
dans la prospérité.
Il faut imiter les vignerons et les
jardiniers ; quand vient la tempête, ils se retirent dans la cabane, et y
restent en paix jusqu’à ce qu’elle soit passée. C’est ainsi qu’au milieu des
tempêtes dont nous sommes menacés à cause de nos péchés et de ceux du monde, il
faut nous retirer sous la tente d’or de la volonté divine, nous réjouissant de
ce que le bon plaisir du souverain Maître s’accomplit en toutes choses.
Je ne veux ni vivre, ni mourir,
mais seulement ce que veut le bon Dieu.
Je meurs volontiers pour faire la
sainte volonté de Dieu.
Offrez au Père éternel le précieux
Sang de son Fils unique, pour qu’il ne soit plus irrité par mes ingratitudes et
me fasse la grâce d’accomplir sa très sainte volonté ; si cette œuvre n’est pas
pour sa gloire, qu’il l’anéantisse, et m’accorde à moi du temps et un asile pour
faire pénitence et pleurer mes grands péchés.



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