

FLEURS DE LA PASSION
PENSEES DE SAINT PAUL DE LA CROIX
LA PASSION
ET LA CONFIANCE EN DIEU.
Dans toute œuvre sainte, armez-vous
d’une grande confiance en Dieu ; que les difficultés ne vous épouvantent pas.
Dieu vous fera voir des prodiges. Soyez donc magnanime et courageux. Mettez-vous
à l’œuvre avec humilité et pureté d’intention, en vue de la seule gloire de
Dieu. Remerciez-le de vous avoir choisi pour une entreprise utile à sa gloire,
et tenez-vous humilié et anéanti en sa présence, vous écriant : Je ne suis
que comme un néant devant vous (Ps. XXXVIII. 6.)
Ayez une grande défiance de
vous-même. Sans moi, vous dit le divin Sauveur, vous ne pouvez rien
faire (Joan. XV. 5.). Et l’apôtre saint Jacques : Tout don excellent,
tout don parfait vient d’en haut (Jac. I. 17.).
Soyons des hommes d’oraison et
vraiment humbles ; soutenons-nous par une grande confiance en Dieu en tout temps
et en toutes choses, et Dieu se servira de nous, tout pauvres et misérables que
nous sommes, pour faire de grandes choses à sa gloire ; sans cela, nous ne
ferons jamais rien de bon.
Ceux qui commencent à servir Dieu
tombent assez souvent dans la défiance lorsqu’ils viennent à commettre des
fautes. Quand vous sentirez naître en vous un sentiment si lâche, il faut vous
élever vers Dieu, et croire que toutes vos fautes, comparées à la bonté divine,
sont moins qu’un brin d’étoupe qu’on jetterait dans une mer de feu.
Figurez-vous que tout cet horizon
que vous découvrez de cette montagne jusque là-bas dans la mer, aussi loin que
vous pouvez voir, est une immense fournaise. Si on y jetait un brin d’étoupe, il
serait absorbé par ce feu et disparaîtrait dans un clin d’œil. Eh bien ! notre
Dieu est une fournaise immense de charité : Deus noster ignis consumens est
[Notre Dieu est un feu dévorant] (Deut. IV. 24.) ; et tous nos défauts sont
moins qu’un fil d’étoupe, en comparaison de sa bonté. Lorsque vous venez à
commettre une faute, humiliez-vous devant lui avec repentance, et puis, par un
acte de grande confiance, jetez votre faute dans cet océan de bonté ; et soudain
elle y sera engloutie, c’est-à-dire effacée de votre âme, et toute défiance se
dissipera en même temps.
Quel est le père qui, tenant un
fils bien-aimé entre ses bras, le laisse tomber à terre et le jette loin de
lui ? Quand il y en aurait un semblable, Dieu, lui, ne saurait agir ainsi ; il
faut du courage à son service.
Jetez un regard sur la croix pour
ne point perdre confiance ! Voici que ce sang divin, ces plaies, ces blessures
mortelles, ces bras qui ont fait le ciel et la terre, sont encore ouverts pour
embrasser les pauvres pécheurs repentants, qui recourent humblement à sa
miséricorde infinie.
Si quelqu’un se trouvait en mer et
qu’il eût au bout du doigt une goutte d’eau douce ; si ensuite il pensait ou se
flattait d’adoucir les eaux de la mer, en y laissant tomber cette goutte, ne
serait-ce pas une vraie folie ? De même l’homme qui pense, croit ou espère
vainement de faire quelque chose de bon sans le secours et l’assistance
particulière de Dieu, se trompe étrangement lui-même. Et s’il venait à
s’approprier ou à s’attribuer la moindre chose, Dieu ne manquerait pas de
l’humilier et de le confondre ; jamais un tel homme ne pourrait servir
d’instrument au Seigneur, ni faire de grandes choses pour sa gloire. La science
sans la véritable humilité donne de l’enflure ; mais l’humilité jointe à la
prière et à la confiance en Dieu seul, avec la somme nécessaire de doctrine,
oblige Dieu à faire des merveilles pour convertir les âmes : conversion qui est
une œuvre toute divine. « Tout ce que la main de mon Père céleste n’a point
planté, sera déraciné » (Mt. XV. 13.).
Je ne me suis jamais inquiété du
temporel, et j’ai vu par expérience que Dieu y a toujours pourvu. Lorsque nous
étions deux, sa Providence fournissait pour deux ; pour quatre, quand nous
étions quatre ; et quand nous avons été plus nombreux, tous ont toujours eu le
nécessaire ; la parole divine s’est vérifiée : Cherchez premièrement le
royaume de Dieu, et le reste vous sera donné par surcroît (Mt. VI. 33.) ;
ne vous inquiétez pas en disant : « Qu’aurons-nous à manger et à boire (Mt.
VI. 25.) ? »
Le vaisseau est lancé sur la mer et
sans voile et sans rame ; mais il est gardé par le grand pilote, qui seul le
conduira sûrement au port. Il est battu par les vents et les tempêtes ; c’est
par là que resplendit davantage la puissance, la sagesse de celui qui tient le
gouvernail. Vive à jamais Jésus-Christ, qui nous a donné la force de tout
souffrir pour son amour…
Dans les œuvres de Dieu, quand les
choses semblent le plus descendre, c’est alors qu’elles montent le plus… Priez
pour nous, afin que Jésus-Christ Notre Seigneur nous fasse triompher de tous nos
ennemis terriblement armés contre nous. Qu’à jamais soit faite la très sainte
volonté de Dieu… Mépris de nous-mêmes, union parfaite avec la volonté divine :
voilà le point capital de la vie chrétienne.



|