

Troisième partie
Saint Jean Bosco - L’homme
Le Seigneur avait doué don Bosco de
talents exceptionnels, mais ces talents, comme ceux de la parabole, étaient
destinés à rapporter cent pour cent, voire davantage. Énumérons-en quelques-uns:
– La mémoire de don
Bosco était prodigieuse. Or la mémoire, c’est très important, car c’est ce qui
permet à l’homme de penser: celui qui n’a rien engrangé dans sa mémoire, cette
sorte de grand sac, n’a pas les éléments indispensables pour pouvoir réfléchir,
comparer, juger, en un mot: penser, et cela tout au long de la vie.
– Don Bosco avait
l’imagination d’un grand constructeur. Et il lui en fallut de l’imagination pour
penser et “voir” à l’avance ce que seraient les œuvres qu’il entreprenait. Car
les projets de don Bosco étaient immenses! Don Bosco voyait grand.
– Son optimisme était
intarissable. Il faut dire qu’il fut souvent aidé par ses visions
extraordinaires qui lui montraient à l’avance, ce que serait ce qu’il
commençait. On peut dire aussi, à ce propos, que sa foi soulevait les montagnes.
– Et toujours, dans
toutes ses entreprises, don Bosco se voulait à la pointe du progrès; c’est ce
qu’il ne cessait de répéter.
– Il ne ménageait pas
sa peine; ce fut même un travailleur forcené: levé le matin dès cinq heures, on
le voyait encore avec ses fils à onze heures du soir.
– Don Bosco était aussi
superbement intelligent, et il lui en fallait de l’intelligence pour mener à
bien tous ses travaux! Sa rectitude de jugement, son esprit clair et solide,
tout en étant simples étaient remarquables.
– Par ailleurs don
Bosco était bon, immensément bon.
– Enfin don Bosco
priait beaucoup Jésus présent dans son Eucharistie, et Notre-Dame Auxiliatrice.
Don Bosco priait Jésus et Marie parce qu’il les aimait immensément, et qu’il
avait en eux une confiance éperdue.
En un mot Jean Bosco aimait Dieu;
et parce qu’il aimait tellement le Bon Dieu, il aimait vraiment son prochain. Il
avait été, selon une expression consacrée: saisi par le Christ et par sa Sainte
Mère, donc totalement abandonné entre leurs bras et à la volonté de Dieu, car
son union à Dieu était parfaite.
Don Bosco eut besoin de sommes
énormes pour réaliser ses œuvres, et la course à l’argent fut pour lui un
véritable cauchemar. Des dizaines de millions passaient entre ses mains, mais
ils ne faisaient que passer. Aussi, que de démarches dut-il faire? Il acceptait
de prêcher des triduums, des neuvaines, des conférences, il rendait toutes
sortes de services. Il organisa des loteries.
Et souvent, miraculeusement, le
Ciel lui venait en aide. Les exemples sont innombrables.
La maison de Turin devait 30 000
francs à un entrepreneur de plus en plus mécontent des retards dans les
paiements. Ce jour-là, il menaçait l’économe qui n’avait rien à lui donner.
L’homme se fâchait:
― Cela ne se passera pas ainsi:
je veux parler à don Bosco.
Sur ces entrefaites un homme se
présente :
― Je veux parler à don Bosco
tout de suite; je n’ai pas le temps d’attendre.
― Mais, don Bosco est déjà avec
quelqu’un...
Entendant du bruit, Don Bosco
ouvre :
― Que voulez-vous, mon ami ?
― Je veux vous parler tout de
suite.
― Mais à votre tour s’il vous
plaît...
― Je suis pressé et ce que j’ai
à vous dire ne sera pas long.
Pas très rassuré, don Bosco fait
entrer l’homme.
― Mais enfin, dîtes-moi ce qui
vous amène.
― Pas grand’chose ; je n’en ai
que pour une minute. Tenez, voulez-vous prendre cela ?
Et l’homme pose un petit paquet sur
la table.
― Allons, mon Père, adieu! Et
priez pour moi.
L’homme sortit. En dépliant le
petit paquet, don Bosco trouva trente billets de mille francs. Don Bosco put
payer l’entrepreneur.
Une autre fois c’étaient 325 francs
que l’on devait au percepteur. Si on ne payait pas avant midi, il y aurait des
pénalités de retard... Il était midi juste quand un monsieur demanda à voir don
Bosco:
― Mon Père, je ne suis pas
riche, mais j’ai là une petite somme que j’ai amassée pour vos enfants.
Voulez-vous accepter cette somme ?
Don Rua compta la somme : 325
francs ! Vite il fallut courir chez le percepteur. Malheureusement le messager
était déjà parti: il était plus de midi, et l’exécution avait été lancée. On put
rattraper le porteur qui s’était attardé sur le chemin, sans raison apparente,
et on se libéra sans frais.
Ces miracles pécuniaires furent
innombrables. Don Bosco n’avait pas un centime, et il réussissait à nourrir des
milliers d’enfants. Il affirmait même: “C’est l’affaire de la Providence.“
Et toujours, qu’il doive vingt, trente, quarante, cinquante ou cent mille
francs, au moment le plus critique, quelqu’un apportait la somme nécessaire, ni
plus, ni moins. Don Bosco ne paraissait même pas surpris.
Un ami de don Bosco âgé de 83 ans,
se mourait lentement à Turin: normal à cet âge! Jean Bosco le visita et assura :
― Non, vous ne mourrez pas tout
de suite; la Sainte Vierge a encore besoin de vous en ce monde, pour la
construction de son église (celle dédiée à Notre-Dame Auxiliatrice)... Que
feriez-vous si Marie-Auxiliatrice vous rendait la santé ?
― Six mois de suite je verse
deux mille francs à votre entreprise.
Marché conclu. Don Bosco met tous
ses enfants en prière. Trois jours plus tard le vieillard, en pleine santé,
arrive chez don Bosco, et lui remet le premier des six versements promis.
Autre exemple :
Nous sommes le 16 novembre 1866.
Don Bosco doit payer 4 000 francs aux entrepreneurs, mais il n’a pas un seul
centime. Ses collaborateurs qu’il avait mobilisés n’avaient réussi qu’à trouver
1000 francs. Alors don Bosco sort. Il ne sait pas où aller, et se retrouve
devant la gare principale. À ce moment il est accosté par quelqu’un qui lui
demande:
― Ne seriez-vous pas Don Bosco ?
― Oui, que puis-je pour vous ?
― Mon maître désire vous voir
tout de suite.
Après quelques mots rapidement
échangés, les deux hommes arrivent devant un immeuble splendide. Don Bosco est
conduit dans la chambre du propriétaire, un homme âgé et malade:
― Mon révérend Père, j’ai grand
besoin de vos prières; vous devriez bien me remettre sur pieds.
― Vous êtes malade depuis
longtemps ?
― Depuis trois ans. Je ne puis
faire un mouvement et les médecins ne me donnent aucun espoir. Si j’obtenais le
moindre soulagement, je ferais bien quelque offrande pour vos œuvres.
― Cela tombe bien. Nous avons
justement besoin, aujourd’hui même, de 3000 francs pour l’église de Notre-Dame
Auxiliatrice.
― 3000 francs ! C’est trop !
Le dialogue se poursuit :
― C’est trop ? fait don
Bosco. N’en parlons plus.
Pourtant don Bosco s’assoit et
entame une conversation sur un sujet politique :
― Mais, mon Père, il ne s’agit
pas de cela : et ma guérison ?
― Votre guérison ? Je vous
propose un moyen, vous le repoussez.
Un nouveau marchandage commence,
puis don Bosco s’écrie :
― À la fin de l’année ! Mais
c’est ce soir que j’ai besoin de cet argent.
― Mais il y a les formalités; il
faut aller à la banque...
― Et pourquoi n’iriez-vous
maintenant à la banque ?
― Vous plaisantez ! Il y a trois
ans que je n’ai plus quitté mon lit...
― Rien n’est impossible à Dieu.
Alors don Bosco rassemble toutes
les personnes de la maison: une trentaine. On dit une prière au Saint-Sacrement
et à Marie-Auxiliatrice, puis don Bosco demande qu’on apporte les vêtements de
Monsieur.
― Mais il n’en a plus.
― Qu’on aille m’en acheter,
s’écrie le malade.
Le malade s’habille malgré le
médecin qui venait d’arriver. Maintenant il se promène dans sa chambre, descend
l’escalier, commande qu’on attelle une voiture, et pendant ce temps, mange avec
un appétit nouveau. Puis il part à la banque. Quelques instant après il apporte
à don Bosco les trois mille francs dont ce dernier avait besoin.
― Je suis complètement guéri, ne
cesse-t-il de répéter.
Et don Bosco de lui dire :
― Vous faites sortir vos écus de
la banque, et Notre-Dame Auxiliatrice vous fait sortir du lit...

|