Saint Jean-Baptiste De La Salle
(1651-1719)

Quatrième partie

La pédagogie de Saint-Jean Baptiste De La Salle

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Les incompréhensions, les persécutions et les souffrances
rencontrées dans l'apostolat

 

Nous avons déjà entendu les mises en garde de saint Jean-Baptiste De La Salle: Toute la reconnaissance qu’on doit attendre d’avoir instruit des enfants, et surtout les pauvres, ce sont des injures, des outrages, des calomnies, des persécutions et la mort même. C’est la récompense des saints et des hommes apostoliques, comme ç’a été celle de Jésus-Christ Notre-Seigneur. N’en attendez point d’autre si vous avez Dieu en vue dans le ministère qu’il vous a confié. (MF 155)

C’est une chose surprenante jusqu’où les ennemis de saint Athanase ont poussé leur rage contre lui. Il n’y a point de calomnies, d’injures, d’impostures, de persécutions, de maux et de tribulations que les ariens n’aient tâché d’employer pour le perdre. Jean-Baptiste De La Salle savait de quoi il parlait quand il ajoutait: ils l’ont accusé de toutes sortes de crimes, de meurtres, de violences et d’injustices, dont il fut cependant tout à fait justifié publiquement, en présence de ceux qui l’avaient accusé, qui furent confus de toutes leurs impostures. (MF 120)

Saint Yon, un modèle dans les persécutions

Jean-Baptiste De La Salle s’efforçait de faire comprendre à ses Frères que les incompréhensions, les calomnies, voire les persécutions, seraient leur seule récompense en ce monde, et il s’appuyait souvent sur la vie des grands saints.

À l’occasion d'une fête de saint Yon il déclara: Remercions Dieu de nous avoir donné pour patron de cette maison (celle de St Yon) un saint qui s’est fait honneur d’exercer, dans le commencement de l’Église[1], la même fonction que nous devons faire tous les jours, et qui a travaillé à la conversion des peuples infidèles, avec un zèle très ardent, parce qu’il n’avait en vue que de les faire être le peuple de Dieu. Mais les idolâtres se saisirent de saint Yon, le fouettèrent cruellement, et puis lui firent trancher la tête. Voilà quelle a été la récompense de ce saint sur la terre, pour tous ses travaux apostoliques... Préparez-vous, vous aussi, à être persécutés... (MA 168)

Et voici ce que Jean-Baptiste De La Salle raconte sur la vie de saint Yon, prêtre martyrisé au pays d’Hurepoix, près de Paris. L‘histoire, dit Jean-Baptiste De La Salle, aurait été rapportée par un pieux et ancien auteur du IXème siècle, qui l’a tirée des meilleurs écrivains de ce temps-là.

Saint Yon accompagna saint Denis, premier évêque de Paris, lorsqu’il vint en France, et il fut associé aux travaux de la mission évangélique. Le choix que cet apôtre de la France fit de lui, pour en être secouru dans un ministère si pénible et si relevé, suppose dans saint Yon toutes les qualités nécessaires à un excellent ouvrier de l’Évangile, et à un apôtre même. Ainsi on peut juger du zèle qu’il eut pour la gloire de Dieu dans la propagation de la foi de Jésus-Christ; de la charité qu’il eut pour retirer les idolâtres des erreurs et des vices dans lesquels ils étaient plongés, et pour leur procurer le salut éternel, surtout le courage et la patience qu’il eut à surmonter les obstacles, à mépriser les dangers, les injures et les menaces des hommes...

Saint Denis l’ayant ordonné prêtre, l’employa principalement dans le canton du territoire de Paris, que l’on a depuis appelé le pays de Hurepoix, et où le diocèse de cette ville joint ceux de Sens et de Chartres. Le lieu principal et le centre de la mission de saint Yon fut la petite ville de Châtres sur la rivière d’Orge... Il fut arrêté par un officier nommé Julien, selon l’ordre qu’il en avait reçu du gouverneur de Paris, qui est le même qui fit martyriser saint Lucien à Beauvais et saint Piat à Tournay... C’est une tradition commune dans tout le pays que saint Yon ayant eu la tête coupée, proche la petite rivière d’Orge, qui passe dans la ville de Châtres, l’échafaud étant dressé sur une éminence, la tête du saint roula dans la rivière, et que son corps descendit et ramassa sa tête: ce qui épouvanta extrêmement les bourreaux aussi bien que tous les assistants... (MA 301)

Sur ce même sujet il faut ajouter ici une remarque très pertinente, faite par saint Jean-Baptiste De La Salle, dans une homélie consacrée aux saints Innocents:

La vie d’un chrétien, dit saint Grégoire, doit être un martyre continuel, puisqu’il n’est chrétien que pour être conforme à Jésus-Christ qui a souffert pendant toute sa vie. Ce martyre est souvent plus rude que celui dans lequel on répand son sang, parce qu’il est incomparablement plus long, et par conséquent, plus difficile à soutenir.


[1] Saint Yon fut un disciple de saint Denis, apôtre de la région parisienne. Il vécut au troisième siècle et mourut martyr vers 287.

    

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